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PARMIGIANI: À QUAND LE RENOUVEAU?

STRATÉGIES

décembre 2017



Après des années de transition et de réorganisation complète depuis 2015, la marque de Fleurier entend repartir sur des bases solides. Avec deux objectifs en tête: la personnalisation et le e-commerce. Des thèmes qu’elle compte intégrer à l’horlogerie de luxe.

Selon une étude, le client moyen de Bugatti possède 42 automobiles... Difficile de dire si le client moyen de Parmigiani Fleurier possède autant de montres. Ce qui est certain, c’est que la marque du Val-de-Travers entend mettre beaucoup plus à profit son partenariat avec la marque ultra-exclusive de Molsheim en Alsace (qui produit environ 500 véhicules par an dans un environnement futuriste). Un partenariat qui avait déjà donné naissance à l’un des modèles les plus emblématiques de la «rupture design» de l’industrie horlogère il y a un peu plus d’une décennie...

Le nouveau modèle Bugatti Type 390 de Parmigiani Fleurier rend hommage au modèle Chiron de Bugatti, la supercar la plus rapide au monde. La Type 370 avait été une révolution en horlogerie en 2004. La marque avait par conséquent été un peu vexée de ne pas avoir remporté de récompense au Grand Prix d’Horlogerie de Genève cette même année. Elle a redoré son blason cette année pour son premier retour à la compétition, avec deux prix pour la Tonda Chronor Anniversaire et la Toric Hemisphères Rétrograde.

PARMIGIANI: À QUAND LE RENOUVEAU? PARMIGIANI: À QUAND LE RENOUVEAU?

Symboliquement, 2017 devait donc incarner le « renouveau » de Parmigiani, deux ans après le départ de son management de l’époque. La Bugatti Type 390 se veut quant à elle un avant-goût d’une année 2018 qui doit confirmer la relance de la marque en mains de la Fondation de famille Sandoz.

«Les points communs entre Parmigiani et Bugatti sont évidents, souligne Steve Amstutz*, Vice-Président et Chief Commercial Officer de la marque. Pas moins de 13 ans de partenariat, ce qui en fait l’association la plus longue de l’histoire entre une marque automobile et horlogère, de l’exclusivité, des processus de fabrication intégrés à l’interne et des séries relativement limitées.»

La Bugatti Type 390

Pourquoi la Type 390? Plus simple qu’on pense: car 390 composants... mais aussi cinq ans de R&D, trois innovations principales, le premier tourbillon dans la collection Bugatti et... les billes les plus petites au monde, pour un peu moins de 300’000 francs.

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Le fondement de l’exercice était la recherche du parallélisme absolu entre le moteur automobile et horloger. Ce qui a abouti à un mouvement mécanique 100% coaxial, c’est à-dire sur un seul axe – ou, pour imager le calibre, en brochette plutôt qu’en pizza, comme le souligne notre excellent confrère François-Xavier Overstake. En prime, une réserve de marche de 80 heures et deux barillets comme c’est la tradition chez Parmigiani Fleurier.

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Surtout, ce mouvement donne des perspectives sur de nouvelles formes avec Bugatti. «Nous pourrons le décliner par la suite par exemple sur un quantième perpétuel, un deuxième fuseau...», souligne Steve Amstutz. La Bugatti Type 390 est proposée en trois séries de 10 pièces en or blanc, en or rose et en titane.

PARMIGIANI: À QUAND LE RENOUVEAU?

Personnalisation et digitalisation, les deux mots-clés

A l’occasion du lancement de ce nouveau modèle dans le magnifique écrin de l’Automobile Club de France sur la Place de la Concorde à Paris, nous avons pu évoquer la stratégie de Parmigiani pour l’an prochain. Deux thèmes principaux en ressortent, qui intéresseront toutes les marques horlogères de luxe, car ils suscitent un grand nombre d’interrogations et d’hésitations: la possibilité pour le client de configurer sa montre, et la vente en ligne de garde-temps dont le prix dépasse la barre des 10’000 francs.

Sur le premier thème, Parmigiani Fleurier présentera au prochain SIHH un système de personnalisation ou configurateur. La seule marque haut de gamme ayant lancé un projet de personnalisation digitale, en 2017, est Armin Strom, emboîtant le pas à Vacheron Constantin qui avait la première osé s’aventurer sur se terrain, peut-être trop tôt... Les clients seront en mesure de personnaliser jusqu’à la couleur du Superluminova, souligne-t-on au sein de la marque de Fleurier, qui s’inspirera pour cela de ce que fait déjà son partenaire Bugatti. Lorsqu’on achète une voiture, on se rend en effet généralement au siège de la marque à Molsheim en Alsace et on affine tous les détails et les caractéristiques de la Bugatti. Elle devient ainsi vraiment exclusive...

PARMIGIANI: À QUAND LE RENOUVEAU?

La production de Bugatti est néanmoins bien moindre, en terme d’unités (pas de taille ni de puissance!), que celle de Parmigiani Fleurier. Et en matière de personnalisation, tout est affaire de taille. Au-delà de certains volumes, ce processus peut devenir un véritable enfer logistique. La marque entend donc ne l’enclencher qu’au-delà d’un certain prix de vente.

«En réalité, il s’agit d’un service que nous proposons déjà et qui est de plus en plus demandé, souligne Steve Amstutz. Nous recevons des requêtes en ce sens presque chaque semaine. Et grâce au pôle horloger dont nous faisons partie, nous pouvons livrer dans des délais raisonnables.»

En cela réside une force d’appartenir à un groupe intégré. Car s’engager sur le terrain de la personnalisation avec des fournisseurs serait plus complexe, en termes de réactivité comme de tarifs pratiqués. Pour l’industrie, la question demeure: est-ce-que des marques de plus gros volume pourront un jour pousser les concepts de configuration et de personnalisation? Ou sera-ce réservé à des petites marques, qui démontrent la flexibilité requise à l’exercice?

Autre question brûlante: quelle réception de la part des détaillants? Ne risquent-ils pas de se sentir court-circuités, eux qui craignent à terme que les marques fassent l’impasse sur les intermédiaires et ne vendent en direct? Steve Amstutz se veut rassurant: «Après le SIHH, nous ferons un roadshow dans le monde entier pour présenter notre modèle de configurateur aux détaillants. Le défi est de concevoir une expérience intime et qu’au final les détaillants puissent se servir de cet outil pour inviter leurs clients.»

Autre chantier important pour Parmigiani Fleurier, autre question brûlante pour tout le secteur de l’horlogerie de luxe (et les détaillants!): le e-commerce. La marque vient de lancer une nouvelle mouture de son site web et entend se profiler l’an prochain comme la marque la plus haut de gamme vendue en ligne...

Collections

«En 2017, nous avons élargi notre offre dans l’entrée de gamme afin d’être un peu plus accessible. C’était le mouvement de fond cette année dans l’industrie. Aujourd’hui, nous avons un certain nombre de pièces proposées entre 10’000 et 15’000 francs. Le modèle Hémisphères en acier coûte 18’000 francs», résume Steve Amstutz.

En 2018, la marque repart vers le haut, au-dessus de 25’000 francs, poursuit le responsable. «On nous attend sur les hautes complications. La stratégie va s’éclaircir dès le SIHH 2018. Nous voulons nous concentrer en particulier sur la collection Kalpa l’année prochaine Elle représente des volumes commerciaux importants avec la Tonda. La Toric est le troisième pilier de Parmigiani Fleurier.»

Quant à la collection Bugatti, elle attire les projecteurs et fait office de poisson-pilote pour fixer les regards sur les capacités techniques de la marque.... «Nous voulons vraiment tirer profit à présent de ce partenariat.»

*Cet article a été réalisé avant l’annonce du départ de Steve Amstutz... ce qui pose des questions sur la stabilité du management à l’interne et du fonctionnement d’une direction en triumvirat. Nous en reparlerons lors du prochain SIHH.