Sous-traitance horlogère


Bracelets et boîtes de montre: Salin fête ses 70 ans

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août 2023


Bracelets et boîtes de montre: Salin fête ses 70 ans

Experte dans la fabrication de composants horlogers en métaux précieux, la société familiale italienne est idéalement placée pour répondre aux demandes d’un secteur qui monte en gamme. Tout en misant sur la collaboration avec le monde académique et l’innovation, comme le traçage ADN pour assurer l’authentification des montres.

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ans la ville de Vicence, au nord de l’Italie, existe une grande et longue tradition du travail de l’or. Une corporation des orfèvres y est recensée dès le début du 14ème siècle et encore aujourd’hui, la grande foire joaillière Vicenzaoro s’y tient deux fois par an. L’Italie s’est imposée comme le premier exportateur mondial de bijoux en or, avec la cité vénète au cœur de cet écosystème.

Fondée en 1953 à Vicence, Salin s’est de son côté distinguée en appliquant cette tradition des métaux précieux à la fabrication de bracelets puis boîtes pour l’horlogerie. Et c’est principalement à destination des fabricants suisses que s’adresse sa production – à hauteur de 90%, le reste se partageant entre Japon et Allemagne.

Vicence est un centre historique du traitement de l'or pour la bijouterie. Salin s'est de son côté spécialisée dans les composants en métaux précieux pour l'horlogerie et s'occupe elle-même de la fusion de l'or (archive Europa Star datant de 1969).
Vicence est un centre historique du traitement de l’or pour la bijouterie. Salin s’est de son côté spécialisée dans les composants en métaux précieux pour l’horlogerie et s’occupe elle-même de la fusion de l’or (archive Europa Star datant de 1969).
©Archives Europa Star

La société créée par Romeo Ermenegildo Salin demeure à ce jour familiale, avec des membres de la deuxième et troisième génération toujours présents dans la structure, rejoints depuis lors également par la famille Zigliotto. Originalement centrée sur le bracelet, sa production s’est étendue aux boîtiers à partir des années 1990: «Cette évolution résulte de problèmes d’intégration des bracelets chez nos clients, relève Ernesto Zigliotto. Les boîtes d’autres fabricants ne correspondaient pas toujours à nos bracelets. Ainsi, démarrer la fabrication de nos propres boîtiers en métaux précieux s’est fait naturellement, sur demande de nos propres clients.»

L'usine de Salin est présentée dans ce reportage Europa Star en 1969.
L’usine de Salin est présentée dans ce reportage Europa Star en 1969.
©Archives Europa Star

Des experts du Locle sont alors recrutés pour transférer sur place ce savoir-faire et un parc de machines est acquis auprès de Willemin-Macodel, partenaire de longue date de Salin. La société travaille principalement l’or, mais aussi des alliages, du platine, du palladium: elle a ainsi récemment acquis une machine entièrement dédiée à la fabrication de composants en platine – un matériau qui représente cette année pas moins de 10% des commandes contre environ 2% précédemment. La part des boîtes elles-mêmes augmente, de 10% de la production totale il y a une décennie à 30% aujourd’hui. A noter qu’outre les bracelets proprement dits, Salin produit également fermoirs et boucles dans son usine de 3’000 m2.

Bracelets et boîtes de montre: Salin fête ses 70 ans

«Nous comptons une clientèle fidèle et fournissons en priorité une vingtaine de maisons depuis plusieurs décennies: par exemple, nous avons commencé à collaborer avec Jaeger-LeCoultre dès les années 1960 ou Bucherer dès les années 1970», souligne Giuseppe Zigliotto. En accompagnant la montée en gamme de l’horlogerie suisse avec de nouveaux équipements et propositions, tout en restant centrée sur les composants en matériaux précieux, Salin, qui compte aujourd’hui quelque 80 employés, a su s’adapter à l’évolution générale du secteur.

Cette adaptation passe aussi par une collaboration intensive avec le monde académique, comme le précise Alberto Salin: «Ces dernières années, nous avons beaucoup travaillé dans le domaine de la métallurgie avec l’Université de Padoue. Tandis que la plupart de nos concurrents achètent des matériaux déjà formés, nous faisons nous-mêmes la fusion des matières, cela va de l’alliage à la livraison de la boîte, glace comprise. La collaboration avec l’université sert à améliorer ces processus, par exemple renforcer la qualité de l’usinage, évaluer la rugosité des matériaux ou encore visualiser leur surface après l’usinage.»

De cette collaboration est ressortie une autre innovation: un marqueur ADN invisible qui peut être appliqué sur les composants pour assurer la traçabilité des montres. Salin distribue ce produit développé par une société locale: «Un algorithme permet de créer un code unique de 20 caractères. Celui-ci est reproduit en laboratoire sous forme de liquide contenant ce code numérique, de l’ADN synthétique qui est fixé sur la surface. Après un temps d’attente de 72 heures, plus rien n’est visible: nous enregistrons où nous avons placé la trace ADN et si nous voulons réactiver ce code d’identification, nous utilisons un agent spécial qui provoque une réaction à son contact. Ainsi l’identification est faite», explique Ernesto Zigliotto.

Le test de reconnaissance, qui dure une quinzaine de minutes, est «similaire à un test covid», avec une double ligne de sécurité quant à sa conformité. Présentée en première mondiale lors du dernier salon EPHJ, cette nouveauté est en train d’être proposée aux marques horlogères. Les tests peuvent être réalisés chez Salin ou chez le client avec un kit adéquat – le plus logique étant de l’effectuer dans les centres de SAV lorsque les montres reviennent en contrôle, pour s’assurer de leur authenticité.

Annonce Salin parue dans Europa Star en 1975. La société fête ses 70 ans en 2023.
Annonce Salin parue dans Europa Star en 1975. La société fête ses 70 ans en 2023.
©Archives Europa Star

Au-delà de son premier domaine d’expertise dans la fabrication de bracelets en or, Salin mise ainsi fortement sur l’innovation, tout en restant centrée sur les composants pour l’industrie horlogère. Comme ce test ADN le démontre, la société, par ailleurs membre du Responsable Jewellery Council, n’exclut pas d’amener d’autres nouveautés, peut-être aussi à l’avenir en joaillerie, dont elle se trouve au cœur d’un riche écosystème à Vicence. De quoi assurer son destin pour les 70 prochaines années.

Bracelets et boîtes de montre: Salin fête ses 70 ans
©Archives Europa Star