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2004: première exposition « Watches and Wonders » à Beijing

Le début de la « ruée » sur la Chine



2004: première exposition « Watches and Wonders » à Beijing

En 2004, le groupe Richemont débarque à Pékin avec sa première exposition « Watches and Wonders ». Le lieu où elle se déroule est exceptionnel: le temple Tai Miao édifié aux portes de la Cité Interdite de Beijing en 1420 pour y recevoir les cendres des empereurs défunts. Après avoir abrité un club de ping-pong durant la révolution culturelle maoïste, voici qu’il accueille les « watches and wonders » des marques du groupe. Une première, en Chine. Le début de la ruée du luxe sur l’Empire du Milieu. Nous y étions et avions envoyé cette lettre. Depuis lors, l’eau a coulé sous les ponts.

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C

hers amis,

La dernière Newsletter que vous avez reçue vous avait été envoyée par Malcolm Lakin depuis un Hong Kong affecté par des pluies diluviennes. Mais, « one country, two systems », quinze jours plus tard, c’est une fin d’été glorieuse qui règne sur Beijing. Le Congrès du Parti communiste chinois, qui vient de clore ses travaux dimanche soir, a confirmé ses options majeures: mener la Chine sur la voie historiquement inédite de la « société de marché socialiste ». Et les résultats sont là, spectaculaires. Le Beijing d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec le Beijing d’il y a dix ans. Audi, BMW et Mercedes défilent pare-chocs contre pare-chocs dans les grandes avenues bordées d’immeubles futuristicos-mandchouriens et autres shopping-malls de marbre blanc. Ici on annonce l’ouverture prochaine du magasin Lamborghini et là l’extension de la boutique Polo Ralph Lauren. Bref, c’est la ruée générale et tout ce que l’Europe et les USA compte de marques de prestige et de luxe se bat pour obtenir le meilleur emplacement. Bien évidemment, l’envers du décor présente une toute autre Chine qui n’a pas encore, et loin, très loin de là, goûté aux délices et aux vertiges de la société de consommation. Mais au rythme actuel (on compte déjà 236’000 millionnaires en cash en dollars et, à court terme, entre 3 à 5 millions de clients potentiels pour l’industrie du luxe) l’émergence d’une classe moyenne ne fait pas de doute, en attendant une amélioration du niveau de vie plus généralisée.

2004: première exposition « Watches and Wonders » à Beijing

C’est ce qu’a parfaitement compris le Groupe Richemont qui vient de lancer en Chine « Watches & Wonders », une prestigieuse et très intelligente opération d’introduction de ses marques sur ce fabuleux marché. Prestigieuse opération, puisqu’elle s’est déroulée dans le décor incroyable du temple Tai Miao, construit aux portes de la Cité Interdite en 1420 et originellement destiné à recevoir les cendres des empereurs défunts (puis transformé en club de ping pong sous la Révolution Culturelle!) et intelligente à la fois car c’est par le biais culturel que cette introduction s’est opérée. Elle a débuté samedi 18 septembre par une très spectaculaire inauguration. Imaginez, disposés sur la vaste esplanade qui s’étend devant le vénérable temple, une cinquantaine de serveurs tout de noir vêtus, chacun debout devant un cube noir sur lequel verres de champagne français et sculpturaux amuse-bouches chinois attendaient les invités. Une présentatrice vedette de la ITV chinoise, et accessoirement experte en gel capillaire, introduisit les orateurs officiels. On procéda au rituel coupé de ruban et la foule put ensuite découvrir l’exposition « Watches & Wonders » installée dans le temple lui-même. Parcours historique de la haute horlogerie depuis ses débuts jusqu’à aujourd’hui, illustré par environ 600 pièces, présentation des métiers d’art, avec deux horlogers, un sertisseur et un émailleur qui peignait un Mao warholien sur un cadran de Jaeger-LeCoultre, et enfin espaces présentant l’histoire et la production actuelle de dix des maisons de haute horlogerie du groupe Richemont (A. Lange & Söhne; Baume & Mercier, Cartier, Dunhill, IWC, Jaeger-LeCoultre, Panerai, Montblanc, Piaget et Vacheron Constantin).

2004: première exposition « Watches and Wonders » à Beijing

Le commerce, bien entendu, reprenait ses droits dans un deuxième temple, situé à l’arrière du premier, dans lequel les CEO des diverses marques pouvaient recevoir leurs hôte, invités et autres VIP. Franco Cologni, qui a la haute main sur l’ensemble des marques horlogères de Richemont et est à l’initiative de cette manifestation, rayonnait. Devant le succès et la haute tenue de l’exposition, les officiels chinois, auprès desquels il a fallu très longuement intercéder pour obtenir la faveur unique de ce lieu d’un prestige assez inégalable, se mettaient tous à revendiquer la paternité de l’initiative.

Pendant ce temps, à deux pas de là, l’immense foule chinoise se pressait sur la place Tiananmen, surmontée d’un gigantesque (et non-warholien) portrait de Mao. Quand je répondais aux jeunes qui cherchaient à lier conversation avec l’étranger de passage que j’étais, et que je leur disais venir de Suisse, leur réponse unanime était « Switzerland, watches, very good watches. » Ce message-là, au moins, est passé depuis longtemps. Quant à faire passer l’autre, celui qui lie le mot « Watches » au mot « Wonders » et le mot « Wonders » aux logos des différentes marques de Richemont, cela nécessitera encore de longs, très longs efforts. Mais les Chinois ne sont-ils pas habitués aux « longues marches »ı

Avec mes cordiales salutations de Beijing et le bonjour de la Chine.