rès d’un siècle (99 ans exactement!) après qu’une montre Rolex entre pour la première fois dans une boutique Bucherer, l’acquisition du «super-détaillant» (lire notre dossier à ce sujet) par son principal partenaire vient d’être annoncée. C’est en effet en 1924 qu’Ernst Bucherer, fils du fondateur Carl Friedrich Bucherer, a conclu avec Hans Wilsdorf l’acte de naissance de ce partenariat fructueux.
Sous la présidence déjà de Jörg G. Bucherer, la société entreprend son internationalisation à partir des années 1980, d’abord vers l’Autriche puis l’Allemagne. Après avoir également procédé à une longue série d’acquisitions de détaillants au cours de son histoire (Kurz en 1989, Swiss Lion en 2001, The Watch Gallery en 2017 et surtout Tourneau en 2018), l’enseigne lucernoise s’est imposée comme l’un des leaders mondiaux du commerce de détail horloger. Un réseau international qui prend une toute autre dimension encore avec sa reprise par Rolex aujourd’hui.
Preuve supplémentaire de la relation privilégiée entre les deux sociétés, Bucherer a été le premier détaillant choisi par Rolex pour déployer son programme de certification pre-owned (CPO) l’an dernier. Sur la centaine de points de vente opérés par le détaillant dans le monde, 53 proposent des modèles Rolex et 48 des modèles Tudor.
Sans descendant direct, Jörg G. Bucherer s’est naturellement tourné vers son partenaire historique pour assurer la reprise de son empire familial. Et il aurait certainement été peu concevable pour la marque à la couronne de voir ce réseau essentiel, historique et fondateur passer en d’autres mains.
Pour autant, la marque tient à rassurer les observateurs du monde horloger sur plusieurs points: Bucherer conservera son identité propre et son autonomie et la collaboration de Rolex «avec les autres détaillants officiels de son réseau de vente restera inchangée». Cette reprise du détaillant est la «meilleure solution pour ses propres marques mais aussi pour l’ensemble des marques de montres et de bijoux partenaires, ainsi que pour tous les employés du groupe Bucherer».
A la manière de son action au sein de la nouvelle fondation Watches and Wonders, avec l’intégration d’un nombre toujours plus grand de marques au salon global, l’horloger genevois adopte historiquement - corollaire sans doute à sa structure particulière et position - une «certaine vision» de l’industrie dans son ensemble et de l’importance de conserver un tissu divers d’acteurs.
En ce sens également, cette reprise est peut-être la solution la plus naturelle pour l’héritage prestigieux de Bucherer. Si elle a frappé les esprits, l’annonce n’a pas pour autant été une surprise totale. Comme le programme CPO introduit l’an dernier par Rolex, elle entérine une reconfiguration importante pour l’avenir de la branche. Et rend la place de la marque genevoise encore plus centrale dans l’industrie horlogère, en la couronnant désormais aussi sur le trône des détaillants.