a classe moyenne chinoise compte environ 350 à 400 millions de personnes, soit plus de 6 fois la population française. Les personnes ayant un revenu égal ou supérieur à 120’000 RMB (env. 18’000 CHF) sont considérées comme la population de la classe moyenne. Par ailleurs, la loi fiscale chinoise exige que tout revenu supérieur ou égal à 120’000 RMB doit faire l’objet d’une déclaration de ses revenus annuels.
On peut ensuite distinguer trois tranches de classes moyennes: de 120’000 à 200’000 RMB; de 200’000.- à 400.000.- RMB; et de 400’000.- à 1 million de RMB la classe moyenne supérieure. Au-dessus, on entre dans la classe des riches..
Une autre distinction importante est la répartition de ces différentes tranches, essentiellement urbaines. Les villes de 1er rang, soit Shanghai, Beijing, Shenzhen et Canton dont les revenus se concentrent l’essentiel des 2ème et 3ème tranches. Les classes moyennes des villes de 2ème rang se situent dans la 1ère et la 2ème tranche.
Concentration urbaine et hausse immobilière
Cette concentration des classes moyennes dans les villes de 1er rang est le résultat d’une véritable flambée des salaires en augmentation constante, de 8%, 15% voire 20% dans certains secteurs depuis 7 à 8 ans et qui touche essentiellement tout le secteur tertiaire. D’une certaine façon, c’est devenu dramatique pour la Chine car le coût de la vie dans des villes comme Pékin et Shanghai est à présent plus élevé que dans les villes occidentales, comme l’a révélé une récente comparaison établie par le Financial Times.
Le marché immobilier a connu une hausse considérable. Par exemple à Shanghai, le prix du m2 est passé de 4’000.- à 5’000.- RMB dans les années 2000 – 2001 à 80’000.- à 100’000.- RMB aujourd’hui. (A noter qu’il faut inclure dans ces prix environ 30% obligatoires consacrés aux espaces communs). Cette flambée témoigne de l’enrichissement extraordinaire de cette importante part de la population chinoise. Aujourd’hui, dépenser de 2 à 3 millions de RMB pour devenir propriétaire d’un logement est devenu chose courante. Ceci dit, la Chine, comme l’Occident, voit les différences sociales s’accentuer.
L’essentiel de cette richesse est concentré dans les villes de 1er rang – où le terrain vient à manquer, désormais – car elles attirent comme des aimants: c’est là qu’on peut y trouver des opportunités, là qu’on peut s’enrichir, là qu’est l’argent. Par contre, les villes de 3ème et 4ème rangs connaissent de graves difficultés. Il y a eu beaucoup de spéculation et on y trouve nombre d’immeubles neufs qui sont vides de tout habitant.
Au niveau de l’immobilier commercial, il souffre sensiblement car les habitudes ont changé rapidement et on assiste à une véritable explosion de l’e-commerce. Si quelques shopping-malls concentrent l’essentiel des ventes, beaucoup d’entre eux souffrent sévèrement voire ne fonctionnent plus du tout. Il faut dire qu’à certains endroits on trouve un shopping-mall tous les 100 mètres. Les Department Stores connaissent eux aussi une véritable désaffection. Quant aux boutiques monomarques, bien d’entre elles voient leurs affaires ralentir ou ferment.
Priorité absolue à la montre mécanique
Trois études récemment menées sur la consommation horlogère en Chine apportent d’intéressants éclairages et se recoupent largement. Elles ont été menées en 2014 et 2015 sur des échantillons très larges d’une tranche de population entre 18 et 55 ans. Selon leurs résultats, les Chinois apprécient beaucoup les montres et presque 50% des sondés disent en avoir plus de trois, jusqu’à 5 pour 21 à 25% d’entre eux.
Quant aux raisons qui président à leur choix, pour un tiers d’entre eux c’est avant tout la marque qui compte, pour un autre tiers c’est le style, la matière et le mouvement, impérativement mécanique pour 85% des sondés. Seuls 25% mettent en avant le prix, et les 5% restants évoquent le service après-vente.
Selon une toute récente étude menée par Bain & Company au 4e trimestre 2016, les achats de montres en Chine ont baissé de 8% en valeur, mais on constate une hausse des achats des produits de luxes à titre privé et au niveau local. Il faut rappeler que depuis le 1er avril 2016, tout produit de luxe (soit + de 10’000.- RMB) acheté à l’étranger doit obligatoirement être déclaré en douane et est taxé à 60%. Les achats locaux sont eux aussi taxés, à peu près à la même hauteur (20% de droits de douane, 20% de taxe sur les produits de luxe et 17% de TVA).
En ce qui concerne les achats via internet sur des sites étrangers, vous êtes exonérés de taxes douanières et de TVA jusqu’à 20’000.- RMB. Au-dessus, vous devez vous en acquitter. Un autre phénomène intéressant à noter est le développement de boutiques duty-free à l’intérieur même de la Chine, qui vendent des marques de montres de moyen de gamme. Un Chinois qui revient de l’étranger peut y acheter de la marchandise détaxée jusqu’à un maximum de 5’000.- RMB. L’idée est d’encourager à consommer en Chine même. Ceci dit, je pense que pour les montres au-dessous de 10’000.- RMB, les taxes d’importation vont être abaissées. Mais pas pour les montres de luxe à partir de 100’000.- RMB. Mais cette catégorie représente moins de 15% des achats de montres, dont 60% concernent les montres de moins de 10’000.- RMB, 20% en-dessous de 50’000.- RMB et 6% entre 50’000.- et 100’000.- RMB.
Environ 80% des consommateurs chinois disent préférer acheter des montres suisses. Mais il est à noter que pour eux c’est l’origine suisse de la marque qui compte, et non pas le Swiss Made qui n’a rien de décisif à leurs yeux.
Le SAV, un enjeu majeur
Les campagnes anti-corruption et anti-extravagance ont bouleversé les habitudes. Désormais, les Chinois achètent pour eux-mêmes et on voit que les achats dans la tranche 50’000.- à 100’000.- RMB ont baissé. Les goûts aussi en ont été affectés. Le consommateur est moins friand des marques considérées «pour les riches», il recherche plus volontiers la simplicité et le raffinement. Avec la montée en gamme de la classe moyenne, la notion de qualité est importante, certes, mais le mot «intemporel» n’évoque pas grand chose au consommateur chinois du moyen de gamme. Il faut que ce soit «à la mode» mais que pour autant ça ne risque pas de se démoder trop vite. Par ailleurs, les marques doivent être conscientes que la qualité du service après-vente fait de plus en plus partie des motivations d’achat. Nombre de consommateurs ne font pas confiance aux horlogers chinois pour le SAV. Ils craignent de se faire avoir, qu’on remplace à leur insu des pièces en or par du faux. Et s’ils ont acheté une montre suisse, souvent ils ne savent pas à qui la confier, à qui faire confiance pour le SAV. C’est un point important. S’ils privilégient la montre mécanique, c’est parce que c’est onéreux et que ça leur «ouvre les portes» de la classe moyenne supérieure ou le club des élites, C’est un gage de réussite. Le statut social est la première chose qui compte pour les hommes.
Les femmes s’attachent plus au design et à la mode mais, toutefois, le mouvement mécanique reste important aussi pour elles. La montée du pouvoir d’achat des femmes est importante et on trouve de plus en plus de femmes qui collectionnent à leur mesure. Sur 100 montres achetées en Chine, 40% le sont par des femmes. Il y a 3 ans seulement, ce n’était que 27% ou 28%. Enfin, il ne faut pas négliger le fait que le consommateur chinois apprend vite, très vite. Grâce à internet, à travers les réseaux sociaux, au cours de ses voyages, il s’informe, fait des comparaisons, se met à la recherche de styles plus personnels, voire désormais de marques de niche. Aujourd’hui, l’amateur chinois peut être considéré comme pleinement mature.
(100 RMB = environ 15.- CHF)
En ce qui concerne les marques les plus recherchées dans les classes moyennes supérieures, les études se recoupent largement: Omega est clairement le numéro 1; en deuxième et troisième positions on trouve Longines; et Rolex ou Rolex et Longines; le numéro 4 est Tissot; au 5ème rang sont Citizen et IWC; Rado est en 6ème position. Et si Cartier est au premier rang pour les bijoux, la marque est 8ème pour les montres.
Les Chinois aiment l’innovation, mais en ce qui concerne les montres, ce n’est clairement pas ce qu’ils recherchent avant tout. A 86% ils privilégient la montre mécanique et craignent que la montre connectée, bien que trendy, se démode vite. A 55%, ils déclarent qu’ils sont certains de ne jamais acheter une montre connectée. 32% sont dans l’expectative, disent qu’ils vont observer l’évolution de ces montres mais n’ont pas l’intention d’en acheter tout de suite.