n découvrant cette montre qui vient à peine de sortir des ateliers, on a aussitôt l’impression qu’elle existe depuis toujours. Ne semble-t-elle pas être déjà un « classique » de la manufacture ? Et pourtant, cette impression est tout à fait erronée puisque jamais encore Patek Philippe n’avait proposé une telle fonction, indiquant le numéro de la semaine de l’année.
Alors, à quoi cette impression tient-elle ?
Elle provient sans doute d’une série de détails inédits, qu’un coup d’œil un peu rapide ne perçoit pas aussitôt mais qui pourtant se ressent immédiatement. Ce qui frappe d’emblée est sa grande lisibilité. L’œil n’a pas besoin d’aller fouiller le cadran pour comprendre comment le lire : la hiérarchie des indications horaires et calendaires, fournies par 5 aiguilles centrales et un seul guichet, est d’une évidence limpide.
Cette « géométrie inédite » s’affiche en noir sur fond de cadran opalin argenté. Seule tranche la pointe rouge en forme de marteau des deux aiguilles centrales qui indiquent le jour de la semaine (dans un cercle central), et concomitamment son mois et son numéro (dans les deux échelles concentriques en périphérie). Seule la date s’affiche traditionnellement à 3h en guichet.
Mais l’ensemble de cet affichage, qui pourrait théoriquement paraître un peu rigide et technique, efficacement utilitaire, vibre d’un attrait tout particulier. Ce cadran nous « retient ». Mais à quoi tient cette séduction ?
- CALATRAVA SEMAINIER RÉFÉRENCE 5212A-001
- Cadran opalin argenté avec décalques noires reproduisant une écriture manuscrite. Index appliques de type «bâton» en or gris 18 carats noirci, lapidés 4 faces. Boîtier acier. Diamètre: 40 mm. Epaisseur totale: 11,18 mm. Etanche à 30 m. Fond verre saphir. Bracelet Cuir de veau, cousu main, brun clair, avec boucle à ardillon en acier. Affichages par aiguilles : heures, minutes et secondes depuis le centre. Jour depuis le centre. Numéro de la semaine avec mois correspondant depuis le centre. Par disque: guichet de date à 3h. Correction du jour à 8h, du numéro de la semaine à 10h. Poinçon Patek Philippe.
Regardez !
En s’y penchant encore un peu mieux, on découvre que la vibration toute particulière de cette pièce provient non seulement de sa géométrie parfaitement centrée mais aussi, surtout peut-être, de sa typographie. Pas un chiffre, pas une lettre qui soit semblable à l’autre, chacun est unique et légèrement différent de l’autre. Car tout est écrit à la main. En l’occurrence, de la main d’un designer de la manufacture dont l’écriture manuscrite, spécifiquement conçue et dessinée pour cette montre, a été reprise telle quelle et décalquée sur le cadran. Une décision assez inspirée de Thierry Stern lui-même, nous affirme-t-on.
Et sans doute est-ce cette typographie qui donne le ton immédiatement vintage à ce semainier. Mais c’est un vintage jamais vu, dans son affichage comme dans son expression, discrètement poétique, nostalgique de la calligraphie, de l’écriture manuscrite
Cette impression vintage est renforcée par le boîtier rond de style Calatrava, de 40 mm sur 11,18 mm, en acier, ce qui n’est guère courant chez Patek Philippe. Avec sa lunette rapportée et ses attaches de bracelet incurvées à double godrons, il s’inspire directement d’un modèle unique de 1955 (la référence 2512 que les aficionados peuvent aller voir au Patek Philippe Museum de Genève). Mettez par-dessus un verre saphir légèrement « box » et la Calatrava Semainier se présente à vous.
Et à notre sens, c’est une très belle réussite, dont on peut sans risque prendre date.
Un nouveau mouvement de base
Et qu’en est-il de sa motorisation ?
L’affichage du jour de la semaine en cours et de son numéro est assuré grâce à un mécanisme semi-intégré dans un tout nouveau mouvement de base à remontage automatique, le calibre 26-330. Basé sur le calibre 324, il s’en distingue par plusieurs innovations et optimisations.
Afin de supprimer tout risque de chevrotement de l’aiguille des secondes, la roue de moyenne traditionnelle a été remplacée par « un système de troisième roue à rattrapage de jeu ». Fabriqué par procédé LIGA en nickel-phosphore revêtu d’une couche d’or/cuivre/indium, ce composant supprime tout risque de chevrotement grâce à des lames-ressort de 22 microns d’épaisseur, insérées dans ses longues dents fendues en deux. La lame agit en plaquant la dent de la troisième roue contre l’aile du pignon, empêchant effectivement tout chevrotement.
Par ailleurs un stop-seconde a été ajouté, qui permet d’interrompre le balancier, de régler la seconde exacte et de le relancer grâce à une impulsion donnée par la couronne.
- MOUVEMENT PATEK PHILIPPE 26-330 S C J SE
- Mouvement mécanique à remontage automatique avec seconde centrale, date, jour et numéro de la semaine. 26 mm x 4,82 mm (mouvement de base 3,3 mm, semainier semi-intégré 1,52 mm). 304 composants (mouvement de base 212, semainier semiintégré 92). Réserve de marche min. 35h – max. 45h.Rotor central en or 21 carats, remontage unidirectionnel. 28 800 alternances par heure (4 Hz). Balancier Gyromax®. SpiralSpiromax® (en Silinvar®).
En ce qui concerne le système de remontage automatique, certaines avancées très techniques ont permis d’en améliorer la performance et la fiabilité en remplaçant par des composants high-tech des pièces qui entraînaient des frottements et exigeaient des réglages supplémentaires. Ainsi en est-il, par exemple, du remplacement de la traditionnelle bascule d’embrayage par une nouvelle roue (de fabrication très complexe, nous explique-t-on) qui, dans un sens entraîne le barillet, et débraye dans l’autre. Autre optimisation, l’ajout d’une roue de réduction qui débraye le remontage automatique lors du remontage manuel. Supprimer les frottements, accroître les performances, la fiabilité, autant, là aussi, de points de détail…qui additionnés font l’essentiel.
Le mécanisme semi-intégré
Le mécanisme semi-intégré du semainier comporte 92 composants supplémentaires et ne mesure que 1,52 mm d’épaisseur, ce qui porte la hauteur totale du mouvement et du mécanisme semi-intégré à 4,82 mm pour 304 composants. Une minceur obtenue grâce à une platine spécifiquement développée et usinée pour intégrer ce mécanisme.
L’affichage des jours est piloté par une étoile à 7 branches placée au centre du mouvement, sur la roue des heures. La roue des semaines, qui comporte 53 dents (car tous les 5 à 6 ans, l’année compte 53 semaines au lieu des 52 semaines usuelles, la prochaine occurrence interviendra en 2020) est entraînée via une bascule par une deuxième étoile à 7 branches qui comporte un doigt plus long pour le dimanche, faisant ainsi démarrer la semaine suivante le lundi (selon la norme internationale ISO 8601, lire l’encadré ci-dessous).
Afin d’éviter des pics de consommation d’énergie – le mouvement automatique a une réserve de marche d’un minimum de 35 heures à un maximum de 45 heures – les changements des indications calendaires sont semi-instantanées et leur saut respectif est légèrement décalé. Par ailleurs, une complication dite « utile » doit pleinement mériter son nom. Ainsi les systèmes de sécurisation mis en place par les constructeurs du mécanisme permettent à l’utilisateur de procéder aux corrections nécessaires à toute heure du jour ou de la nuit. Pour le jour et le numéro de la semaine, celles-ci s’effectuent grâce à deux poussoirs respectivement placés à 8h et à 10h. La date, quant à elle, se règle par le biais de la couronne (tirée en position intermédiaire, la position maximale permettant la mise à l’heure exacte par le stop balancier).
Redisons-le tout haut, cette Calatrava Semainier est une réussite en tous points et est très certainement promise à un bel avenir. Ne dit-on pas aussi « Dieu est dans le détail » ?
Un semainier perpétuel est-il envisageable ?
Le système de numérotation de la semaine est défini par la norme ISO 8601. Créée en 1988 et basée sur le calendrier grégorien et le système horaire des 24 heures, cette norme « spécifie la représentation numérique de la date et de l’heure » et, partant, de la numérotation des semaines. Une numérotation principalement utilisée à des fins organisationnelles par l’industrie, le commerce, l’informatique. Cette norme ISO, reconnue internationalement, précise que la semaine commence le lundi, que les jours sont numérotés de 1 à 7, que la semaine 1 est celle qui contient le premier jeudi de l’année et la dernière semaine celle qui contient le dernier jeudi de l’année.
Mais, comme l’explique Wikipedia, « l’année civile ne contient en général que 52 semaines de sept jours, mais cela ne fait qu’un total de 364 jours. L’année faisant en réalité 365 jours un quart, la date du premier jour de chaque semaine recule d’une année sur l’autre, d’un jour, ou de deux dans les années bissextiles. S’il n’y avait pas de temps en temps une 53e semaine intercalaire, la semaine 1 d’une année finirait par appartenir entièrement à l’année précédente. »
Question aux horlogers : sachant que la 53e semaine intercalaire apparaît de façon un peu « aléatoire », serait-il envisageable de construire un semainier mécanique perpétuel ? On se gratte la tête en examinant ces quelques exemples : en 2020/21, 2026/27, 2037/38 et 2048/49, la semaine 53 commencera un lundi 28 décembre pour s’achever un dimanche 3 janvier ; mais en 2032/33 la semaine 53 commencera un lundi 27 décembre et s’achèvera un dimanche 2 janvier… A vos calculs !