était le 24 novembre 2002: un cambriolage mettait à sac le Musée de l’horlogerie et de l’émaillerie de Genève. En quelques minutes, l’essentiel des collections, le patrimoine horloger de la République, s’évanouissait, comme le relatait Le Temps à l’époque: «De la fameuse collection Liotard, ne restaient plus que quelques fragments d’émail.»
Mais le quotidien se montrait peut-être trop optimiste en ajoutant: «On parle réouverture, on formule des projets (…) Irréparable, le désastre semble avoir produit un effet salutaire: ranimer l’attachement des Genevois à leur patrimoine; rappeler la valeur d’un musée public et indépendant dont la crédibilité scientifique conforte l’ancrage historique de la place horlogère suisse tout entière.»
Car plus de vingt ans plus tard, ce traumatisme n’est toujours pas digéré. L’établissement n’a pas rouvert ses portes. Les collections ont été transférées dans les sous-sols du Musée d’art et d’histoire de Genève, mais sont loin d’être la priorité de cette institution généraliste. Un musée privé spécialisé d’une exceptionnelle richesse, celui de Patek Philippe, a de facto pris le relais sur le terrain auprès des visiteurs – son grand succès démontrant du reste l’attrait d’un établissement dédié à l’horlogerie pour le grand public!
Des pièces qui s’accumulent... loin des regards
Mais la Ville de Genève ne met toujours pas en avant ses propres collections, qui demeurent inestimables – d’autant plus qu’au fil du temps, un certain nombre de pièces dérobées ont été retrouvées. C’est cette anomalie historique, ce véritable paradoxe (cette «genevoiserie», dirait-on outre-Versoix!) que la députée Masha Alimi, du parti Libertés et Justice Sociale de Pierre Maudet, entend réparer à travers la motion qu’elle a déposée au Grand Conseil.
«Cette motion donne au Conseil d’Etat la mission de créer un musée dédié à l’horlogerie, souligne l’élue. Quand on pense Genève, on pense tout de suite montres! L’ambition est de partager avec le plus grand nombre l’histoire de l’horlogerie, d’en démocratiser la connaissance, car elle n’est pas limitée au monde du luxe. Par la même occasion, cela créerait certainement des vocations pour l’horlogerie.»
- Quelques merveilles de feu le Musée d’horlogerie de Genève présentées en 1996 dans les pages d’Europa Star. Vers une renaissance?
- ©Archives Europa Star
Cette motion doit passer en commission avant d’être votée au Grand Conseil. Depuis la fermeture du musée, pas moins de 20’000 pièces – dont de nombreux legs – demeurent loin du regard des Genevois et des amoureux d’horlogerie, faute d’espace d’exposition approprié.
Même si le Musée Rath, actuellement sous-occupé et accueillant chaque année l’exposition du Grand Prix d’Horlogerie de Genève, est souvent évoqué dans les discussions, la motion se contente de mettre sur la table le projet de musée, sans préciser de lieu spécifique.
Charge à la volonté politique de prendre le relais… et faire surtout honneur à l’identité horlogère de Genève!