ertains des mots-clés de l’horlogerie – l’icône, la Haute Horlogerie – se sont renforcés ces dernières années. D’autres – la Chine – se sont effrités, voire effondrés. Ce sont ces mots-clés que revisite, dans un exercice que permet la numérisation de nos archives, Pascal Brandt, déjà journaliste pour Europa Star dans les années 1990, qui a repris de l’exercice comme chroniqueur depuis l’an dernier à travers ses contributions «Passé/Présent/Futur» dans notre nouveau numéro.
Dans celles-ci, il reprend, avec ce que l’on sait au 21ème siècle, certains de ses articles du 20ème siècle. Ses intuitions se seront-elles confirmées? Ou au contraire l’horlogerie sera-t-elle allée dans une autre direction que celle envisagée par les observateurs de l’époque? Après nos récentes chroniques «uchroniques», c’est à un nouvel exercice se jouant des frontières du temps que nous nous livrons. Quoi de plus naturel pour une publication dédiée à l’industrie qui égrène heures, minutes et secondes, mais aussi années et siècles!
- Un extrait d’Europa Star en 1998. Retrouvez les chroniques historiques de Pascal Brandt dans notre dernier numéro en p. 22. ©Archives Europa Star
Parmi les mots-clés de l’horlogerie, peut-être faudrait-il à présent ajouter ceux de «stocks» ou d’«inventaires», de «sell-in» et «sell-out», dont nous n’avons pas fini d’entendre parler dans la séquence qui s’est ouverte cette année et qui feront certainement l’objet de chroniques ultérieures.
Montre en stock… Le dilemme a repris de plus belle: sell-in ou sell-out? Les statistiques d’exportation officielles se voient décorrélées des estimations de ventes finales. L’industrie horlogère y est habituée. Face au ralentissement qui se confirme, les inventaires s’accumulent et ont déjà quitté le pays.
La montre n’est pas un produit de grande consommation. Le processus d’achat, qui pouvait être éclair durant les années d’euphorie et de listes d’attente, est long et fastidieux. Car la montre en appelle à l’émotionnel, pas à l’essentiel. Sauf à considérer ses émotions comme essentielles, ce que l’on serait parfois bien avisé de faire!
Il n’empêche: la séquence d’exubérance qui s’est terminée aura au moins eu le mérite d’élever la montre mécanique au statut d’icône de désirabilité. «Icône», on y revient. Ce n’est pas rien: un objet qui aurait pu – voire dû –, en toute et froide rationalité, mourir il y a cinquante ans, a atteint ces dernières années un statut dont elle n’aurait jamais pu ne serait-ce que rêver alors. Et les créateurs-entrepreneurs qui sont au plus proche de l’établi, de François-Paul Journe à Philippe Dufour, en passant par Kari Voutilainen que nous mettons en exergue dans ce numéro, vont continuer de toucher le cœur de leur communauté.
Alors n’en oublions pas pour autant ces autres mots-clés qui, à long terme, portent cette industrie, à travers celles et ceux qui en font le meilleur usage: «main», «artisanat», «émotion», «résilience»… Et ce mot-clé qui se verrouille sans cesse, ce «temps» qui court contre nous mais dont nous savons parfois nous accommoder!