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BEIJING WATCH FACTORY ET FIYTA JOIGNENT LEURS FORCES

CARNET DE VOYAGE: ASIE

janvier 2018


BEIJING WATCH FACTORY ET FIYTA JOIGNENT LEURS FORCES

Depuis octobre 2016, la «Beijing» et Fiyta ont conclu un partenariat de complémentarité qui pourrait engendrer le meilleur de l’horlogerie chinoise. Interview du nouveau directeur de la Beijing Watch Factory, Monsieur ChuangYue Xu (徐创越).

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iyta est la marque horlogère chinoise la plus connue à l’international: c’est le chronométreur officiel de l’Agence spatiale chinoise depuis 2003 et un exposant de la prestigieuse Halle 1 de Baselworld depuis 2010. Elle est aussi leader en termes de volumes de vente et la marque plus avant-gardiste en design. Seul bémol, elle s’est toujours contentée de calibres étrangers.

A l’opposé, la vénérable Beijing Watch Factory reste chinoise jusqu’au bout des aiguilles: production de mouvements mécaniques, automatiques et de grandes complications 100% manufacture!

Europa Star: Pour la Beijing Watch Factory, quel est l’avantage de ce partenariat avec Fiyta?

ChuangYue Xu: D’abord, la «Beijing» profite du réseau de distribution tentaculaire de Fiyta (le réseau de distribution Harmony, ndlr). Ensuite, le marketing et surtout le design se font désormais dans les bureaux de Fiyta. Ainsi, la Beijing peut se concentrer sur son coeur de métier, la manufacture de mouvements. Même nos cadrans émaillés ou brodés sont élaborés en externe, mais par des artistes de Pékin.

Lors de notre visite en 2011, les aiguilles et boîtes étaient également produites sur place, n’est-ce plus le cas?

Non! Et cela à la fois pour des questions de coûts et de qualité. Les boîtes sont usinées dans la province méridionale de Guangzhou, chez un fournisseur de qualité.

Jusqu’ici, la «Beijing» était une marque destinée à une élite chinoise. En découvrant la nouvelle collection, on est surpris par un design jeune et audacieux. La Beijing vise-t-elle un public plus large?

En effet, le prix de la nouvelle collection se situe entre 2’000 et 3’000 yuans (300 à 450 francs). Même dans notre collection de tourbillons, nous lançons de nouvelles pièces au style très chinois, mais sans cadran émaillé et avec une boîte en acier, dans une fourchette de prix oscillant entre 2’500 et 4’000 francs. Désormais, le prix de vente moyen d’une montre Beijing en boutique est 3’500 yuans (520 francs). Peut-être est-on positionné trop bon marché car bien des clients sont surpris.

Monsieur ChuangYue Xu
Monsieur ChuangYue Xu

Attention, c’est l’un des problèmes en Chine, un prix bas laisse supposer une moindre qualité!

En effet, notamment pour des grandes complications. «Comment pouvez-vous vendre un tourbillon à ce prix alors que c’est inaccessible sur les marques internationales?», nous demandent les clients suspectant une qualité douteuse. D’une part nous maîtrisons ces techniques et, d’autre part, nous visons désormais une clientèle plus jeune et non fortunée.

Votre gamme de mouvements en 2011 était déjà impressionnante: tourbillon, double tourbillon, eight days tourbillon, minute repetition tourbillon, orbital tourbillon et un mouvement mécanique à double échappement offrant 100 heures de réserve de marche… De nouvelles complications se sont-elles ajoutées depuis lors?

En 2015, nous avons conçu un nouveau calibre à tourbillon, le TB10, dont la particularité est de ne mesurer que 2,8 mm d’épaisseur. C’est le plus fin de la production chinoise et le deuxième plus fin au monde. Sa phase de fiabilisation se termine actuellement.

Lors de notre visite d’usine, en 2011, les machines-outils étaient suisses et très anciennes. Est-ce toujours le cas en 2017?

De nombreuses machines datent en effet des années 1960. Mais comme vous le savez, le marché des mouvements se porte mal, ce qui ralentit le renouvellement et la modernisation de notre parc de machines-outils. Mais pour les pièces nécessitant des machines à commande numérique, nous utilisons celles de Fiyta, à Shenzhen. C’est d’ailleurs l’un des atouts de notre coopération.

Le design de la nouvelle collection est audacieux. Est-ce sous l’influence de Fiyta, référence en termes de design, organisant même des concours?

Oui, nous avons mis sur pied une équipe de designers dans le studio de style de Fiyta, exclusivement dédiée aux montres Beijing Watch Factory. Peut-être que cette première collection s’inspire beaucoup du style Fiyta car nos designers n’ont pas encore parfaitement cerné l’ADN de la Beijing Watch Factory. Mais l’orientation est claire, nous voulons que nos montres respirent la culture chinoise. Je vous promets, cette année encore, le lancement de modèles très chinois.

BEIJING WATCH FACTORY ET FIYTA JOIGNENT LEURS FORCES

Et du côté de Fiyta, le partenariat prévoit-il enfin l’utilisation des mouvements chinois, de marque Beijing?

C’est le but, mais dans l’immédiat, Fiyta ne peut pas encore se passer des mouvements Miyota et ETA, nos calibres n’ont pas encore atteint un tel niveau de qualité. Nos mouvements automatiques SB1, SB11 et SB16 n’atteignent pas les standards de ETA, mais sont en progression.

Améliorer les mouvements, j’entends cela depuis presque dix ans et c’est toujours le statu quo...

C’est très difficile car il faut déjà changer les habitudes de travail sur toute la chaîne de production. Il y a aussi l’outil industriel qui nécessiterait de gros investissements. Et comme le commerce des mouvements tourne au ralenti actuellement, les marques chinoises n’arrivent pas à investir dans la technique des mouvements.

Sea-Gull brandit les mêmes arguments concernant le manque de fiabilité de ses mouvements et se paie une gigantesque usine neuve dans la zone industrielle de Tianjin, au lieu d’investir dans la qualité des mouvements. Ne touchons-nous pas ici le vrai problème de l’industrie chinoise: investir dans la forme plutôt que dans le fond?

Je pense que le vrai problème réside dans la formation des employés. Nous n’avons pas de structure offrant une formation continue comme chez vous. Ainsi, les compétences ne progressent guère. Le problème c’est surtout ça, et moins les finances ou les matériaux. Ce problème de formation touche d’ailleurs toute la hiérarchie, du patron au plus simple employé. Et puis, il y a un créneau commercial dans les mouvements bon marché. En poussant la qualité au niveau de Miyota, il faudrait peut-être diviser la production par cinq! Pour notre part, au cours des deux dernières années, nous avons stoppé la production de mouvements de basse qualité. Mais la Beijing Watch Factory ne peut opérer un tel changement compte tenu de sa relative petite taille.