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«Les ponts entre connexion et complication vont se multiplier»

FRÉDÉRIQUE CONSTANT

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février 2019


«Les ponts entre connexion et complication vont se multiplier»

Frédérique Constant fête ses 30 ans en 2018. Dans la discrétion qui la caractérise, avec un style tout sauf exubérant, la marque récemment acquise par le groupe Citizen a paradoxalement cassé beaucoup de barrières dans l’industrie, qu’il s’agisse de la complication abordable ou de la montre mécanique connectée. Entretien avec son nouveau CEO Niels Eggerding.

V

ous fêtez vos 30 ans. Serait-il possible de démarrer la même aventure aujourd’hui? Les startups horlogères sont nombreuses sur Kickstarter mais ce sont souvent des succès ultra-éphémères, le temps d’une récolte de fonds...

Il ne faut pas se leurrer: ce serait beaucoup plus difficile. La concurrence est féroce. Nous comptons aujourd’hui 3’000 points de vente. Ce serait mission impossible de créer ce réseau aujourd’hui. L’un de nos plus grands atouts aujourd’hui est clairement notre réseau de partenaires. Nous avons maintenu une confiance mutuelle, alors que beaucoup de marques ouvraient leurs propres boutiques. Cette stratégie ne change pas suite au rachat par Citizen.

Niels Eggerding est le nouveau CEO de Frédérique Constant et Alpina
Niels Eggerding est le nouveau CEO de Frédérique Constant et Alpina

Comment coordonnez-vous vos opérations avec le groupe?

Nous fonctionnons selon un principe simple: nous ne partageons rien en terme de production et tout en terme de distribution et de ventes. Citizen ne s’implique pas de manière directe dans le fonctionnement de la marque. En revanche, ils ont un poids énorme aux Etats-Unis, marché qui nous échappe encore largement. Là où nous sommes faibles, ils sont forts. Le groupe nous apporte un soutien financier et commercial. Sans eux, il serait difficile de croître dans les conditions de marché actuelles.

Allez-vous aussi collaborer avec vos détaillants lorsqu’on parle de vente en ligne?

Oui, nous allons aussi évoluer vers le e-commerce en partenariat avec nos détaillants. Dans des pays comme la France, nous avons déjà un système qui inclut les détaillants dans le circuit: le client peut choisir de recevoir la montre chez lui ou d’aller la chercher chez un détaillant. La condition pour être agrée, c’est que les ventes se fassent à prix plein.

Pour célébrer ses 30 ans, Frédérique Constant a présenté un tourbillon à quantième perpétuel
Pour célébrer ses 30 ans, Frédérique Constant a présenté un tourbillon à quantième perpétuel

Pourtant, dans le cas d’Alpina, vous avez vendu en direct les modèles connectés via Kickstarter...

L’opération AlpinerX sur Kickstarter a été un succès. Surtout, au-delà des ventes de l’ordre de 3’000 montres pour un total de 1,5 millions de francs, c’est une affaire de data mining: nous avons pu récolter plus de 5’000 feedbacks directs de nos clients. C’est très précieux, car nous en apprenons ainsi beaucoup sur le profil et les attentes de nos clients finaux. Cependant, cette opération ne sera pas reconduite: elle était vouée à être un one-shot.

La nouvelle série de modèles Runabout inspirés des bateaux Riva
La nouvelle série de modèles Runabout inspirés des bateaux Riva

Quelle est la part de la montre connectée dans votre production totale?

Depuis 2015, nous avons produit 120’000 montres connectées. Sans ce nouveau créneau, nous n’aurions pas pu connaître la croissance. Et c’est aussi un outil puissant de communication. Nous continuons à travailler en parallèle sur les smartwatches, le quartz, la mécanique. L’an passé, Frédérique Constant a écoulé un total de 160’000 montres. Outre les montres connectées, nous avons investi le monde des belles complications mécaniques avec un quantième perpétuel en 2016 et un chronographe flyback en 2017. Cette année, nous présentons un tourbillon à calendrier perpétuel, ainsi qu’un modèle connecté avec mouvement manufacture. Les ponts entre tous ces univers se multiplient.

Sur le front de la production, que va vous apporter votre nouvelle manufacture de Plan-les-Ouates?

Nous avons de la place pour grandir. La production sur le nouveau site va démarrer en juin 2019. Ce projet récompense les efforts continus de Peter et Aletta Stas: ils n’ont jamais fait trop de bruit mais ont patiemment construit une compagnie solide qui a gagné ses galons horlogers. Le mouvement manufacture en a surpris plus d’un, tout comme les montres connectées. Aujourd’hui, nous comptons 75 horlogers sur site, qui travaillent sur des mouvements Sellita de base, des Sellita à modification et – désormais pour 20% de la production – des calibres maison.

La nouvelle manufacture de Frédérique Constant à Plan-les-Ouates commencera les opérations en juin 2019
La nouvelle manufacture de Frédérique Constant à Plan-les-Ouates commencera les opérations en juin 2019

Vous proposez une horlogerie très classique, avec des codes plutôt intemporels. En même temps, on remarque sur votre créneau un fort intérêt pour des modèles à la personnalité très affirmée, souvent des rééditions des années 1960 et 1970...

Le patrimoine est un sujet important: sans en dévoiler plus, je peux déjà vous dire que je suis en train de travailler sur notre patrimoine pour la préparation d’une future nouvelle collection. Pour toute marque horlogère, il est bien plus aisé de travailler sur des succès du passé, qui ont déjà fait leurs preuves. Mais nous restons relativement jeunes, à l’échelle de l’industrie.

Certains de vos concurrents directs, comme Raymond Weil et Maurice Lacroix, ont décidé de faire l’impasse sur la foire de Bâle l’an prochain. Et vous?

Nous avons besoin de Baselworld, c’est un moment annuel de réunion de l’industrie et un rituel qui nous tient à cœur.