enu du monde de la finance, où il a passé près de deux décennies dans des établissements comme Merrill Lynch ou Paribas ainsi que dans un hedge fund, petit-fils de Bernie Ecclestone, le Britannique James Marks a l’habitude de fréquenter les «High Net Worth Individuals». En 2018, il décide de faire de sa passion pour l’horlogerie, démarrée très tôt, son métier en rejoignant Aurel Bacs chez Phillips, sur un marché en plein essor.
Mais il ne vient les mains vides. Car il a un plan: rendre l’offre horlogère de Phillips plus accessible - pas seulement en termes de prix, mais surtout en démarrant un réseau de boutiques physiques accompagnés d’une plateforme en ligne pour faciliter l’achat de modèles, en faisant un pas de côté du monde feutré et parfois intimidant des ventes aux enchères traditionnelles.
Ce concept a un nom: Perpetual. Et le réseau s’étoffe. Après Londres, Gstaad et Hong Kong, une nouvelle enseigne devrait voir le jour cette année à Zurich. Le choix des modèles que l’on trouvait sur la plateforme, à l’heure d’écrire ces lignes, allait d’une Graham Swordfish à £1’950 jusqu’à une Rolex Cosmograph Daytona SACO à £285’000. Un choix large, donc, personnalisé et soigneux. Nous avons rencontré James Marks.
- James Marks est l’initiateur et le responsable de la plateforme Phillips Perpetual.
Europa Star: Comment ont été développées les premières boutiques horlogères physiques chez Phillips?
James Marks: J’ai approché Aurel Bacs et je lui ai dit qu’il y avait une opportunité à saisir, car dans la plupart des villes du monde, une grande partie du public potentiel n’est pas familiarisée avec le monde des ventes au enchères. Elle est plus habituée à aller dans des boutiques physiques, à traiter avec des détaillants. Pour capter l’intérêt de ce public, le meilleur moyen est passer par un canal qu’ils connaissent déjà bien, comme une boutique physique. Par ce biais, j’étais convaincu que nous pourrions faciliter leur introduction au monde des ventes aux enchères, en passant par les ventes en boutique. Le pari a été gagnant et c’est ainsi que Phillips est devenue la première maison de ventes aux enchères à disposer d’une boutique dédiée à l’horlogerie.
Où et quand avez-vous démarré?
A Londres en 2019. Depuis lors nous avons doublé la surface de cette boutique à Berkeley Square, en intégrant également des pièces de joaillerie. En 2023, nous avons ouvert une nouvelle boutique dans le Pedder Building à Hong Kong. Nous avançons pas à pas, stratégiquement, sans empressement.
- La nouvelle boutique Phillips Perpetual de Hong Kong a ouvert au Pedder Building en 2023.
Avez-vous été inspiré par les concepts des marques elles-mêmes, comme les AP Houses par exemple?
Pas spécifiquement. Mais j’ai fait deux constats: dans une ville comme Londres, les grandes fortunes ne veulent pas faire leurs achats au rez-de-chaussée, pour des raisons de sécurité. Par ailleurs, dans le domaine du luxe, les clients sont toujours plus séduits par un espace détendu, pas trop strict. Le commerce de détail au rez-de-chaussée fonctionne bien pour les articles les plus communs. Mais le vrai business se passe à l’étage!
- En 2020, pour sa deuxième année d’activité, Phillips Perpetual annonçait plus de 5 millions de livres de vente, portée par des modèles de Philippe Dufour et F.P.Journe entre autres. L’année suivante, la plateforme mettait en vente la première montre-bracelet Charles Frodsham Double Impulse en or blanc offerte au public.
D’autres maisons de vente aux enchères ont également ouvert leurs boutiques horlogères…
Nous avons dû les inspirer! Ce qui compte, c’est l’accès aux bons clients avec la plus grande commodité et un service accessible en tout temps en toute heures. Nous avons ajouté une corde à notre arc avec les boutiques Perpetual dans cette mission générale. Aujourd’hui, vous pouvez acheter en salle de vente, en ligne, en boutique…
Quelles sont les différences entre les montres dans le réseau Perpetual et celles dans les ventes Phillips?
Toute montre vendue chez Perpetual aurait sa place dans un catalogue de vente aux enchères Phillips. Nous ne lésinons pas sur la qualité, la provenance et la rareté. Et nous sommes sur de la vraie collection: par exemple nous avons proposé des modèles de Charles Frodhsam ou la Simplicity de Philippe Dufour. Là où nous nous distinguons du reste de la maison, c’est au niveau de notre clientèle: 70% de notre clientèle est nouvelle chez Phillips. Et ensuite la moitié d’entre eux vont également s’engager dans le monde des enchères. Nous sommes devenus une véritable vitrine pour les nouveaux clients Phillips.
- En 2022, Phillips Perpetual organisait à Londres l’exposition «Made in Germany», une rétrospective sur les montres Lange 1 et Datograph de A. Lange & Söhne produites de 1994 à 2008.
Sur l’ensemble des pièces que l’on vous propose, quel est votre taux d’acceptation?
Entre 10% et 20%. Nous nous concentrons sur les pièces les plus intéressantes, nous ne faisons pas du «volume». Cette sélection drastique nous immunise d’ailleurs contre les vagues de spéculation que l’on peut observer en horlogerie. A tout moment, nous avons en moyenne entre 25 et 50 pièces en vente. La rareté est un critère, mais nous couvrons tout le spectre de l’horlogerie, y compris des modèles plutôt abordables. Ils sont visibles sur notre site et dans nos boutiques à Londres ou Hong Kong, ainsi qu’à Gstaad où nous avons également un espace en haute saison. Tous les modèles sont proposés à prix fixe, il n’y a pas de système d’enchères. Et il y a quelque chose de spécial pour tout le monde!
- Plusieurs pièces de la série Hommage II en collaboration entre Laurent Ferrier et Phillips en association avec Bacs & Russo ont été proposées chez Perpetual en 2022.
Vos clients achètent-ils davantage en ligne ou en boutique?
A 65% en ligne, car c’est un mode d’achat très pratique. En ce sens, nous jouons à fond notre rôle de vitrine pour Phillips. La plupart de nos sélections couvrent les décennies 2000 et 2010, mais pour les pièces les plus vintage notamment, une boutique physique garde un avantage important car elle permet de voir ces pièces rares de ses propres yeux avant l’achat. Et aucune de nos pièces n’est disponible qu’en ligne, on peut toujours la trouver dans une de nos boutiques. Nous tenons à ce que nos clients achètent auprès d’un spécialiste, pas d’un simple vendeur.
- L’an dernier, Phillips Perpetual proposait la première montre-bracelet à répétition minutes décimale au monde, créée par Kari Voutilainen.
Justement, allez-vous étoffer votre réseau de boutiques dans le monde?
Oui nous ouvrons cette année une nouvelle boutique et des bureaux à Zurich, pour nous rapprocher aussi des marques suisses. D’ailleurs je quitte moi-même Londres pour venir m’installer en Suisse (sourire). Nous allons aussi développer notre offre de pièces de joaillerie, notamment celles des maisons les plus iconiques.
Les relations entre marques et maisons de ventes sont parfois compliquées. Comment comptez-vous vous rapprocher d’elles?
Nous sommes très attentifs dans nos sélections. Et nous collaborons directement avec certaines d’entre elles: il y a déjà eu des éditions limitées Perpetual en partenariat avec Zenith, Bulgari, Piaget ou encore Laurent Ferrier. Nous avons également organisé une exposition avec A. Lange & Söhne.