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Une sphère céleste exceptionnelle

PATRIMOINE

décembre 2017



C’est un objet exceptionnel et totalement fascinant: une splendide sphère ajourée qui serait la plus ancienne représentation asiatique - ou tout du moins japonaise - de la voûte céleste dotée d’un mécanisme d’horlogerie. Une pièce de qualité muséale, unique et inédite, vendue 912 000.- francs suisses le 13 décembre à Genève par la maison Piguet Hôtel des Ventes.

Une sphère céleste exceptionnelle

C’est un objet exceptionnel et totalement fascinant: une splendide sphère ajourée qui serait la plus ancienne représentation asiatique - ou tout du moins japonaise - de la voûte céleste dotée d’un mécanisme d’horlogerie. Une pièce de qualité muséale, unique et inédite, vendue 912 000.- francs suisses le 13 décembre à Genève par la maison Piguet Hôtel des Ventes. Elle aurait été acquise avant 1936 par Xavier Givaudan auprès d’une galerie parisienne d’objets asiatiques (on est alors en plein « japonisme ») et conservée jusqu’à présent dans la famille. Tout porte à croire qu’il s’agit là d’une découverte majeure.

L’objet est constitué de deux hémisphères en cuivre joints par des vis sur l’axe écliptique de façon à créer une sphère d’environ 115 cm de circonférence et de 37 cm de diamètre. Tout démontre que cet objet de grande précision et de haut artisanat a été fabriqué au Japon au cours du XVIIème siècle et est sans doute le fruit d’une étroite collaboration entre artisans d’art japonais et un ou des horlogers, peut-être d’origine occidentale, au fait des traditions astronomiques asiatiques. Elle a été conçue de façon à représenter la voûte céleste en mouvement, avec les positions du soleil, de la lune et des étoiles, tels qu’observées depuis a latitude d’Edo, l’actuelle Tokyo, alors capitale des shogun Tokugawa, maîtres effectifs de l’empire depuis les années 1600. De fines analyses métallurgiques ont confirmé cette origine japonaise et cette datation.

Une sphère céleste exceptionnelle

Montée sur un support hexagonal d’une étonnante modernité de forme, la sphère est très finement incisée d’idéogrammes dorés et de motifs traditionnels en forme de nuages. Largement ajourée de semblables formes nuageuses, elle laisse voir en son centre un coffret métallique quadrangulaire dont le couvercle est orné d’une carte du monde schématique représentant le Japon, l’Asie, l’Afrique et l’Europe.

Une sphère céleste exceptionnelle

A l’intérieur de la sphère, de petites billes métalliques représentent le soleil et la lune. Elles sont attachées par des anneaux dentelés sur la surface intérieure de la ceinture écliptique percée de 365 petits trous rectangulaires qui représentent le parcours annuel du soleil d’ouest en est sur fond d’étoiles vu par un observateur terrestre. Conformément à la mesure du cycle solaire ayant cours en Extrême-Orient, calculée d’un solstice d’hiver à l’autre , la ceinture écliptique est divisée en 24 périodes solaires de temps égal, dont le nom formé de deux caractères est incisé et doré sur la sphère à des intervalles réguliers d’une durée de 15 ou 16 jours, ce qui permettait de positionner la sphère conformément à la saison solaire en cours. Subtilement figurées à l’intérieur de la sphère, on peut voir les étoiles et observer leur position ainsi que celle de la voie lactée.

L’axe de la sphère est rattaché à un mécanisme d’horlogerie extérieur comportant une roue d’’échappement à couronne dentelée laquelle engrène dans les deux palettes de la verge d’un foliot. Mais hélas, le foliot lui-même a disparu. La roue de tambour inférieure, munie d’une gorge, démontre qu’elle était destinée à entraîner la corde d’un poids et de son contrepoids, tous deux également manquants.

Une sphère céleste exceptionnelle

Tout porte à croire qu’on est là en face d’un objet qui n’a pu être conçu qu’en « collaboration » entre astronomes, artisans et horloger(s) occidentaux ou très au fait des techniques occidentales d’alors. Selon l’historien et expert Dominique Fléchon (par ailleurs collaborateur régulier d’Europa Star), l’échappement de cette sphère est en tous points semblable dans son principe à celui des horloges de la Forêt Noire du XVIIème siècle.

Une sphère céleste exceptionnelle

Devant cet objet inédit, la maison Piguet Hôtel des Ventes a confié une étude approfondie de la sphère au Professeur Christopher Cullen (successeur du célèbre Joseph Needham, éminent spécialiste de l’horlogerie asiatique, à la tête notamment du Needham Research Institute de Cambridge). Son analyse exhaustive et fouillée dans le moindre des détails, que nous avons pu consulter, destinée à une prochaine publication scientifique, confirme en tous points le caractère tout à fait unique et exceptionnel de cette merveilleuse sphère.

Estimée entre 100’000.- et 150’000.- CHF, elle vendue au prix de 912’000.- francs suisses mercredi 13 décembre chez Piguet Hôtel des Ventes, à Genève.