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Le CSEM rend le cadran vivant

INNOVATION

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janvier 2022


Le CSEM rend le cadran vivant

L’utilisation d’un module de silicium déposé sur le cadran permet d’imaginer une multitude d’animations du visage de la montre. Cette technologie développée par le CSEM augure d’un nouvel horizon créatif pour l’industrie horlogère. Présentation.

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ifficile de ne pas retrouver son regard d’enfant quand on découvre les «cadrans vivants» développés par le CSEM, un centre majeur de recherche en microtechnologies basé à Neuchâtel (au sein duquel a notamment été développé l’échappement en silicium). Ici, ce sont des poussières d’étoiles qui s’assemblent au fil du temps qui passe pour composer des «paysages» sur le cadran, sous forme de motifs poétiques représentant des phases de lune. Là, ce sont des motifs décomposés qui s’assemblent pour former les index de la montre au passage de l’aiguille des heures.

Frédéric Loizeau, en charge du transfert de technologie au CSEM, présente cette innovation avec enthousiasme. «Cela fait plusieurs décennies déjà que nous travaillons sur des composants flexibles dans le cadre de notre collaboration avec l’industrie spatiale. En associant nos savoir-faire dans le spatial, le silicium, et l’horlogerie, nous avons réussi à concevoir une complication mécanique qui se «pose» simplement sur le cadran et permet de déclencher des animations grâce à un système de cames, tiges et contacts suiveurs.»

Aussi fin qu’une feuille de papier, ce module monolithique de silicium se compose de pas moins de 384 éléments déformables – soit 32 pièces par animation sur un cadran à 12 index. Le responsable précise: «La valeur de cette innovation vient notamment du contraste entre son apparente simplicité – tout est visible sur une seule couche – et l’observation qui frappe d’entrée: aucune roue dentée n’est présente. Le mécanisme en soi est magique aux yeux du passionné: on ne sait pas comment cela fonctionne.» Ces complications d’un nouveau genre sont compatibles avec tout mouvement mécanique, tant qu’elles peuvent brancher leurs contacts suiveurs sur la bonne information.

Le concept de pièce monolithique à éléments flexibles est en usage depuis des décennies dans l’industrie spatiale, car il permet d’éviter le frottement ou la fatigue.

«Moon Dust»: Le cadran est composé de centaines d'étoiles. Certaines s'assemblent pour former la phase de lune en cours.
«Moon Dust»: Le cadran est composé de centaines d’étoiles. Certaines s’assemblent pour former la phase de lune en cours.

Former et déformer la matière

Sans forcément le savoir, on utilise quotidiennement un système flexible similaire – mais beaucoup plus rudimentaire – lorsque l’on décapsule son shampooing ou sa boîte de Tic Tac: il s’agit d’une seule pièce de plastique qui s’ouvre en se déformant. Les mécanismes développés par le CSEM fonctionnent sur la base de la formation – puis déformation – des composants flexibles pour former les motifs souhaités. L’usage du silicium est essentiel pour travailler avec la précision requise, de l’ordre du micron.

Tout en recourant à un matériau innovant et à des principes en œuvre dans l’aérospatiale, cet «automate de cadran» a aussi une filiation directe, bien horlogère, avec les automates des Jaquet-Droz du 18ème siècle, puisqu’il repose sur un système similaire de cames transmettant les informations d’animation de la pièce.

Sans forcément le savoir, on utilise quotidiennement un système flexible similaire – mais beaucoup plus rudimentaire – lorsque l’on décapsule son shampooing ou sa boîte de Tic Tac.

Le CSEM rend le cadran vivant

Une âme poétique

A l’origine, Francis Cardot, chercheur au CSEM, a imaginé et développé de toute pièce ce concept afin d’apporter une autre âme, plus poétique, à l’affichage horloger. Des finitions peuvent être réalisées sur les motifs ainsi créés, par exemple sous forme de peinture miniature. «Libre cours à l’imagination: avec ce nouveau type de complication, les possibilités créatives sont quasiment infinies pour les horlogers», souligne Frédéric Loizeau.

Suite à de premières consultations sur cette innovation au sein de l’industrie horlogère, le CSEM envisage de créer une entité distincte afin d’en poursuivre le développement et de la valoriser commercialement. Frédéric Loizeau l’assure: l’industrialisation de cette technologie aura de quoi dynamiser la créativité de toute marque. On veut bien le croire… et l’on attend avec impatience les premiers résultats!

«Libre cours à l’imagination: avec ce nouveau type de complication, les possibilités créatives sont quasiment infinies pour les horlogers.»