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La Société Suisse de Chronométrie sort du bois pour ses 100 ans

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mai 2024


La Société Suisse de Chronométrie sort du bois pour ses 100 ans

Dédiée à l’échange et la transmission de savoir pour stimuler l’innovation horlogère, la SSC est l’un de ces (rares) acteurs qui démontrent qu’il est encore possible de réunir des concurrents pour «penser» en tant qu’industrie. Elle célèbre un siècle de bons et loyaux services, par vents et marées.

C

e mois de juin 2024, une cérémonie officielle marque le centenaire de la naissance de la Société Suisse de Chronométrie (SSC), dans la Salle des Abeilles du Palais de l’Athénée à Genève, lieu même de sa constitution. Comme il y a cent ans se réunissent des représentants des autorités, de l’université et de l’école d’horlogerie de la ville (qui fête elle-même son bicentenaire) ainsi que des directions techniques des marques. Mais si elle trouve ses racines dans la cité de Calvin, la SSC, qui compte aujourd’hui près de 1’500 membres, a bien connu un rayonnement national, puis mondial avec l’organisation tous les trois ans de son Congrès international de chronométrie.

«Depuis un siècle, nous restons fidèles aux fondamentaux établis en 1924, à savoir réunir l’industrie autour du partage de savoir, afin de stimuler l’innovation de l’écosystème horloger suisse dans son ensemble», souligne Olivier Kuffer, responsable de département au R&D chez Rolex qui a repris la présidence tournante de la SSC en début d’année. Les quatre bureaux régionaux de l’organisation assument chacun la présidence pour trois ans et le hasard a voulu que ce soit le tour de Genève, son lieu de naissance, pour cette célébration du centenaire.

A l'ordre du jour pour le centenaire de l'Ecole d'horlogerie de Genève en 1924: la fondation de la Société Suisse de Chronométrie (JSH, 1924).
A l’ordre du jour pour le centenaire de l’Ecole d’horlogerie de Genève en 1924: la fondation de la Société Suisse de Chronométrie (JSH, 1924).

Tout a démarré «lors de la célébration du centenaire de la disparition d’Abraham-Louis Breguet en 1923 à Paris lors d’un congrès national de chronométrie où plusieurs vœux sont émis pour que les normes et les systèmes garantissant la mesure exacte du temps soient harmonisés. La Chambre suisse de l’horlogerie, persuadée de l’utilité d’une telle organisation pour défendre les intérêts du pays à l’étranger, prend les choses en main et l’idée fut émise de constituer en Suisse une entité pour traiter de ces questions.»

En 1924, c’est sous l’égide de Léopold Defossez, alors directeur de l’Ecole d’Horlogerie du Locle, qu’un Comité d’initiative est d’abord constitué à La Chaux-de-Fonds, dont les travaux mèneront le 5 octobre de la même année à la création de la SSC, à Genève, à l’occasion des Fêtes du centenaire de l’Ecole d’horlogerie de la ville.

Olivier Kuffer, président de la Société Suisse de Chronométrie
Olivier Kuffer, président de la Société Suisse de Chronométrie

Le champ de départ – «l’étude de toutes les questions concernant la chronométrie au point de vue scientifique, ainsi que de leurs applications dans le domaine industriel» – a été élargi au fil du temps pour inclure tous les domaines de la technique horlogère, de l’habillage et l’intégration de nouveaux matériaux aux métiers d’art, au design ou désormais au recours et bénéfices de moyens numériques et nouvelles technologies. Une institution bien en phase avec son temps, donc.

En tant qu’«association la SSC est accessible à toute personne s’intéressant aux questions relatives à l’horlogerie». La société repose également sur la bonne volonté de ses membres et la mise à disposition de ressources par les marques et les acteurs de l’industrie horlogère. Lors des rencontres, chacun laisse sa «casquette» d’appartenance au vestiaire, car, au final, les travaux et échanges menés profitent à chacun.

Le Palais de l'Athénée, lieu de naissance de la Société Suisse de Chronométrie, représentée dans le JSH en 1924.
Le Palais de l’Athénée, lieu de naissance de la Société Suisse de Chronométrie, représentée dans le JSH en 1924.

Lieu d’interactions, la société édite son propre bulletin, tient à jour une vaste base de données d’articles et trouve son point d’orgue chaque année lors de sa Journée d’Etude qui réunit la crème de la crème des acteurs techniques de l’horlogerie. L’édition du centenaire, qui aura lieu le 25 septembre, se tiendra au CERN sur le thème des «Artistes du Temps». Sortant quelque peu du bois pour l’occasion de son 100ème anniversaire, la société a aussi annoncé sa participation pour la première fois au salon EPHJ, autre lieu privilégié de rencontres pour les maîtres de l’innovation horlogère.

Quels sont les axes prioritaires de développement de la SSC? «Génération après génération, nous allons continuer à pérenniser nos valeurs et à tisser des liens forts entre les acteurs de l’industrie, répond Olivier Kuffer. A ce titre, les différents types de rencontres que nous organisons régulièrement permettent tant des échanges techniques à travers les conférences proposées que des échanges humains où des liens d’amitiés se créent au fil des ans et façonnent la valeur de notre association. Nous nous préoccupons également de fédérer les acteurs de la branche pour en pérenniser les différents métiers. Et nous encourageons la relève, nous essayons de stimuler l’intérêt des nouvelles générations, alors que le défi des écoles est de pouvoir continuer de trouver et former les talents qui feront demain le succès de notre industrie.»

 Lauréats du Concours de réglage 2023 présents à la Journée d'Etude de la SSC. Pas moins de 114 candidats issus de 23 centres de formation ont participé à cette édition.
Lauréats du Concours de réglage 2023 présents à la Journée d’Etude de la SSC. Pas moins de 114 candidats issus de 23 centres de formation ont participé à cette édition.

Parmi ses multiples initiatives, la SSC organise notamment un concours de réglage ouvert aux étudiants de dernière année des différentes écoles suisses d’horlogerie. Elle décerne aussi une médaille d’or à des figures marquantes du domaine et nomme des membres d’honneur. Et Olivier Kuffer d’appuyer la volonté de la société de faire revivre «des prix d’excellence déjà décernés par l’association par le passé» afin de stimuler encore davantage l’innovation dans les métiers associés à la technique horlogère.

Une présentation de la SSC dans Europa Star en 1978
Une présentation de la SSC dans Europa Star en 1978

Comme l’a montré à de très nombreuses reprises l’histoire de l’horlogerie suisse, cette industrie est bien plus forte lorsqu’elle est unie – tout en entretenant une saine concurrence. Réunissant des marques à la fois en compétition au jour le jour et actrices d’un destin commun à long terme, la Société Suisse de Chronométrie est peut-être l’une des organisations les plus emblématiques de cet «esprit de corps» dont l’horlogerie ne saurait faire l’économie. Sa longévité le prouve…

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