e nouveau propriétaire du salon EPHJ, indispensable à la vitalité du tissu horloger suisse, provient lui aussi d’un petit pays européen, fortement industrialisé et multilingue. C’est en effet le groupe belge Easyfairs, fondé en 2004 par Eric Everard et opérant des dizaines de salons professionnels sur tout le continent, qui a annoncé le rachat de la plateforme suisse, numéro un mondial de l’industrie de la haute précision qui réunit chaque année à Genève près de 800 entreprises et plus de 23’000 visiteurs.
«Après 22 années d’engagement passionné, nous avons jugé que le moment était venu de transmettre le flambeau. Cette décision mûrement réfléchie s’inscrit dans une logique naturelle de transmission, liée à notre parcours, mais aussi à la volonté de garantir un avenir solide au salon EPHJ. Nous sommes fiers du chemin parcouru et extrêmement confiants dans le choix du repreneur», ont déclaré les deux fondateurs du salon, André Colard et Olivier Saenger, à propos de cette reprise.
Et de s’adresser aux exposants, «avec qui nous avons bâti ce salon, au plus près de leurs préoccupations et dans leur intérêt. Qu’ils soient tous remerciés et confiants; nous sommes convaincus que ces valeurs seront conservées par le nouvel acquéreur, Easyfairs, qui a démontré toutes ses compétences pour réussir à perpétuer un tel événement.»
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- De gauche à droite: Roland Brand, CEO Easyfairs de la région D-A-CH-Italie, Benoît David, Group Head of M&A and strategic alliances, Olivier Saenger, fondateur du Salon EPHJ, Anne Lafère, co-CEO groupe Easyfairs, André Colard, fondateur du Salon EPHJ, Matt Benyon, co-CEO du groupe Easyfairs et Alexandre Catton, directeur du Salon EPHJ.
Pour Roland Brand, directeur général d’Easyfairs DACH-Italie, cette acquisition représente «un ajout idéal à notre portefeuille d’événements dédiés à l’industrie manufacturière, qui compte désormais 30 salons au service de pôles industriels stratégiques. Notre ambition est d’assurer la pérennité des fondations posées par ses créateurs, en respectant profondément l’identité du salon, tout en lui apportant les moyens d’un rayonnement international accru.» Le groupe, qui emploie 870 personnes, organise actuellement 110 événements dans 16 pays et gère huit halls d’exposition en Belgique, aux Pays-Bas et en Suède.
Au cours de son histoire, le salon EPHJ s’est diversifié vers tous les segments de la microtechnique, ainsi que les medtechs, au-delà de ses racines horlogères et à l’image d’exposants qui eux-mêmes diversifient leurs activités. L’équipe en charge du salon, dirigée par Alexandre Catton, continuera à le gérer afin d’en assurer la continuité sous le nouvel actionnariat.
Europa Star: Comment la vente d’EPHJ à Easyfairs s’est-elle opérée?
Alexandre Catton: Avant toute chose, il faut souligner qu’André Colard et Olivier Saenger ont créé un événement devenu incontournable pour la représentation des entreprises dans notre industrie. Ils ont estimé, après plus de 20 ans d’engagement et le temps qui passe, qu’il était temps pour eux de passer la main. Toutefois, ils voulaient être sûrs que les valeurs qui ont permis le succès du Salon EPHJ soient conservées. Il s’agissait donc de trouver un repreneur garant de la pérennité du modèle actuel avec, bien sûr, la possibilité de s’ouvrir à de nouveaux horizons à définir. Mais il est essentiel d’en conserver la trame, la convivialité, et la formidable dynamique d’échanges, de rencontres et d’affaires. Ils ont obtenu des garanties en ce sens des nouveaux propriétaires et ils partent l’esprit serein.
Dans quel sens?
L’objectif n’est pas de tout brusquer. C’est d’ailleurs ce que j’ai ressenti en rencontrant les CEO de Easyfairs et les dirigeants d’autres salons détenus par le groupe. Ils ne font pas du copier-coller d’un salon à l’autre, il y a une sensibilité propre à chaque univers. Et l’on sait bien qu’il faut du temps pour appréhender la complexité de l’industrie suisse, un secteur particulier dans un pays particulier. Cela dit, ce n’est pas leur première opération ici, ils ont déjà des événements en Suisse allemande. Au final, cette transaction vise à garantir le futur du salon. André et Olivier ont transmis des valeurs et un sens au salon, qui doivent perdurer.

Pour vous, qu’est-ce que ce changement de propriétaire signifie?
Mon rôle reste le même. Il y a une nouvelle dynamique intéressante apportée par Easyfairs. Des synergies peuvent exister avec d’autres événements internationaux qu’ils organisent, notamment sur les thèmes de l’automation, des moteurs ou du packaging. Nous allons pouvoir faire jouer cette dynamique de groupe, ce qui est une opportunité pour les exposants actuels et pour attirer de nouveaux exposants. Nous bénéficierons certainement d’une force de frappe technologique accrue mais aussi de synergies sur certains aspects opérationnels et administratifs. Nous devrions avoir des opportunités de présenter davantage EPHJ à l’international et d’attirer de nouvelles entreprises, tout en donnant de la visibilité à nos partenaires.
Justement, par le passé, nous avions déjà eu des discussions sur les possibilités d’«exporter» EPHJ à travers le monde. Où en êtes-vous dans ces réflexions stratégiques?
Nous allons poursuivre ces discussions avec les nouveaux propriétaires, dans l’optique de faire toujours mieux rayonner les entreprises de la haute précision et de la micromécanique dans le monde. Nous planchons déjà sur des manières d’attirer davantage de visiteurs venus du monde entier tout en étudiant les opportunités de secteurs de diversification qui existeraient pour nos exposants. EPHJ bénéficie d’une vraie renommée pour la haute précision. Nous discutons actuellement de modèles pour en faire plus bénéficier nos exposants. Nous sommes là pour défendre leurs savoir-faire.

Dans l’industrie horlogère suisse, la baisse des volumes se poursuit. Quelles parades peuvent trouver les fournisseurs impactés dans leurs commandes?
Beaucoup sont à la recherche d’alternatives et comme le soulignait récemment Jean-Jacques Weber, Président de la Fédération de l’Horlogerie française, le maintien du milieu de gamme est essentiel pour la survie de toute l’industrie. Le luxe a pris une telle place que d’une part, les volumes baissent et que de l’autre, les exigences ont considérablement augmenté, ce qui pose de nouveaux défis aux fournisseurs. Ce à quoi s’additionne l’accumulation de nouvelles normes, générant de la complexité supplémentaire - et des segments comme les medtechs sont encore plus complexes de ce point de vue. Mais l’horlogerie reste une superbe carte de visite pour beaucoup de savoir-faire, aussi dans l’optique de se diversifier. Récemment, j’ai rencontré un entrepreneur japonais de nouvelle génération qui me disait qu’il n’avait sélectionné que des machines suisses pour ses activités. Le Swiss made reste synonyme de culture de la qualité.
