est certainement le meilleur «contrepoint» à la concentration toujours plus forte du commerce de détail horloger, qui voit la constitution de chaînes spécialisées sur plusieurs pays, voire continents. Après huit générations et une histoire ininterrompue depuis 1760, le détaillant zurichois Beyer Chronometrie n’a jamais franchi les frontières cantonales, encore moins nationales, malgré de nombreuses sollicitations en ce sens et autres propositions de «franchises» internationales au fil des décennies.

Cela ne l’empêche pas de demeurer une adresse prestigieuse, si ce n’est la plus prestigieuse, du circuit horloger, dégageant une aura mythique, tout autant que celles de ses deux partenaires historiques Rolex et Patek Philippe qu’elle représente à Zurich. Et d’attirer – pré-Covid – une clientèle de connaisseurs venus du monde entier. Peut-être que ce refus obstiné de s’étendre conforte même sa légende…

Peut-être que ce refus obstiné du détaillant de s’étendre conforte même sa légende…

Quelques-uns des nombreux garde-temps virtuels imaginés par les artistes et les designers mandatés par le détaillant historique suisse Beyer Chronometrie pour son incursion dans le monde des NFT.

Du CPO au NFT

«La famille Beyer a toujours voulu garder la maîtrise de son environnement, ce qui n’est pas possible à travers de multiples filiales», relève Philippe Meyer, responsable marketing qui épaule René Beyer, le représentant de la huitième génération de la famille fondatrice. Pour autant, la boutique s’est constamment adaptée à son époque. Des exemples? «Le certified pre-owned (CPO) est un concept à la mode, or Beyer Chronometrie achète et vend des montres de seconde main depuis 1965 déjà! De même, nous avons figuré parmi les premiers détaillants traditionnels utilisant Instagram.»

Preuve supplémentaire de cet état d’esprit mêlant innovation et enracinement – ce qui peut surprendre – le détaillant se lance à présent dans les NFT! «Nous ne nous y lançons pas avec un business plan strict ou des attentes précises, simplement avec l’envie de générer de la créativité, explique Philippe Meyer. Lorsque notre agence digitale nous a approchés fin 2021 pour nous présenter sa nouvelle unité dédiée au metaverse, nous y avons vu l’opportunité de faire un essai, celui de créer la première collection de montres NFT de Beyer Chronometrie.»

«Lorsque notre agence digitale nous a présenté sa nouvelle unité dédiée au metaverse, nous y avons vu l’opportunité de créer la première collection de montres NFT de Beyer Chronometrie.»

S’affranchir des contraintes du réel

S’il n’est pas lui-même à l’origine du projet, René Beyer a donné son aval à ce pas en avant vers l’inconnu et le virtuel… «Sur le plan créatif, on peut tout se permettre avec les NFT, car les barrières du réel, du physique n’existent plus. En soi, ce projet est peut-être encore plus artistique qu’horloger.»

Beyer Chronometrie a ainsi proposé à quatre créateurs, issus de différents domaines d’activité, d’imaginer des modèles virtuels de montres: Simon Husslein, designer et professeur d’architecture d’intérieur à la HEAD à Genève; Niklaus Hodel (The Shoe Guy), spécialisé dans l’univers de la chaussure de luxe; Ricardo Diaz, un artiste 3D chargé en plus de retranscrire les designs virtuels; Florian Beck, spécialiste du digital à l’initiative de ce projet baptisé FTSY8 (lire «Fantasy») x Beyer Chronometrie.

Beyer Chronometrie a proposé à quatre créateurs, issus de différents domaines d’activité, d’imaginer des modèles virtuels de montres.

Les résultats sont proprement décoiffants. Et justement, à des années-lumière de ce que l’on pourrait attendre d’un détaillant de huit générations. Parmi les modèles, on peut mentionner «Allevo» avec son mouvement qui flotte au-dessus du cadran, «Sky Spotter»» avec un drone qui vient se poser sur le boîtier ou encore «The Hanoi» qui recrée la montre iconique du film Pulp Fiction.

«Pour ce projet, nous travaillons à l’intersection entre horlogerie, technologie, gaming, streetwear et mode, souligne Philippe Meyer. Il y aura un choix très large de modèles NFT avec de multiples déclinaisons qu’il sera possible d’acquérir sur une plateforme dédiée.» Plutôt que de s’étendre physiquement, après huit générations, le détaillant a finalement trouvé un nouveau terrain d’exploration… virtuel et sans limites.