Horlogerie et environnement


Iris Alt.: conjuguer féminité et conscience écologique

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novembre 2022


Iris Alt.: conjuguer féminité et conscience écologique

Force est de constater que sur le marché actuel, les options de montres dites «féminines» restent assez limitées. Des déclinaisons de modèles hommes serties de pierres et de diamants ou des montres joaillières exubérantes constituent l’essentiel de l’offre contemporaine. Une créatrice passionnée de montres-bijoux entend changer la donne, tout en privilégiant la conception la plus éco-responsable possible. Rencontre avec Valérie Minassian, fondatrice de la marque Iris Alt.

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our bien comprendre la genèse de la marque Iris Alt. (pour «Alternatives»), il faut se pencher sur le passé de la créatrice Valérie Minassian. Son grand-père était mineur de charbon et elle en a gardé un souvenir ému et une sensibilité exacerbée quant à la dureté du travail minier. Lorsqu’elle entend parler de diamants de laboratoire pour la première fois en 2019, cela provoque l’étincelle.

«Une alternative aux diamants miniers devenait possible grâce à ce procédé génial et pouvait être développée pour une montre féminine, se souvient-elle. Le projet Iris Alt. s’est façonné à partir de là.» Mais Valérie Minassian voulait aller plus loin dans une démarche éco-responsable, en ayant recours à des matériaux respectueux de l’environnement.

Valérie Minassian, fondatrice de la marque Iris Alt.
Valérie Minassian, fondatrice de la marque Iris Alt.

Sa rencontre avec Eliska Stepankova, diplômée de l’École Boulle et designer de bijoux et de montres depuis près de 20 ans, a été décisive: les deux femmes se rejoignent sur leur vision et leurs valeurs. À contre-courant du mouvement non-genré actuel, elles veulent créer un modèle spécifique pour les femmes, insuffler une créativité qu’elles estiment manquante et surtout intégrer une dimension totalement éco-responsable dans leurs designs dès le départ. Iris Alt. est lancée. Le travail commence.

Trouver son écosystème

«Il a fallu trouver les bons partenaires à chaque étape de la production afin d’identifier les matériaux recyclés et recyclables, souligne Valérie Minassian. Nous cherchions en France au début pour faire du 100% Made in France, mais nous n’avons pas trouvé. Nous sommes donc allées en Suisse où nous avons découvert la société Panatere (lire son portrait ici, ndlr), qui s’occupe désormais de la plupart de nos matériaux et du façonnage de nos montres. Cela a pris du temps pour mettre en place l’écosystème global pour les composants, les matériaux, le bracelet, les diamants de laboratoire, mais nous y sommes arrivées.»

Aëlla, le premier modèle de la marque
Aëlla, le premier modèle de la marque

Le résultat est à la hauteur des aspirations des deux entrepreneuses. Le boîtier est en acier 4441, issu de copeaux d’acier recyclés d’entreprises jurassiennes. L’impact carbone de ce métal recyclé est six fois moindre que l’acier traditionnel. Le cadran est réalisé par Panatere en ZEP 1510®, un alliage recyclé par électrolyse des cendres de sacs poubelles par l’usine d’incinération Kebag à Zuchwil et tréfilé par la société Grillo à Duisburg. Son impact environnemental est de 0,30 kg équivalent CO2 (CO2e) par kilo produit, soit dix fois inférieur à un alliage de cuivre conventionnel (3 kg CO2e).

Le bracelet est confectionné en cuir marin par l’entreprise lyonnaise Ictyos à partir de peaux de poisson récupérées de l’industrie agroalimentaire. Les diamants sont, bien entendu, de laboratoire. Leur production est actuellement effectuée en Asie mais Valérie Minassian essaie de trouver une solution qui serait plus proche et moins carbonée – la tâche s’avère cependant complexe. Enfin, le mouvement est un calibre automatique suisse, fiable et reconnu, le Sellita SW200B.

Sobre et circulaire

Dès lors, quelle est l’empreinte globale de la montre ainsi produite? Valérie Minassian reconnait en toute franchise: «Nous ne l’avons pas encore calculée totalement. C’est un processus de longue haleine que d’effectuer l’analyse complète du cycle de vie d’un produit. Nous y travaillons.»

La montre a-t-elle été envisagée dans une démarche éco-responsable, de sa création… à sa fin de vie? «C’est une montre automatique, elle n’a donc pas vraiment de fin de vie!, répond l’entrepreneuse. Ceci dit, tous ses composants sont recyclables et l’on pourrait tout à fait envisager de récupérer un ancien modèle pour en créer un nouveau.» La société revendique ainsi son appartenance au mouvement de l’économie circulaire.

Iris Alt.: conjuguer féminité et conscience écologique

Le premier modèle baptisé Aëlla, dessiné par Eliska Stepankova, se présente comme une véritable montre-bijou de 26 mm, tout en acier ou sertie de diamants baguette. Son prix sera, respectivement, de CHF 3’500 et CHF 4’500, pour de première ventes prévues début 2023. La montre est épurée et d’une grande élégance, pouvant être portée au quotidien aussi bien qu’en soirée. Mais surtout, elle arbore fièrement le label «Circular Swiss Made» sur son visage noir mat, symbolisant tout le sens que ses deux créatrices ont voulu lui insuffler.

Iris Alt.: conjuguer féminité et conscience écologique